Publié le 2 Janvier 2015

« Ne vous inquiétez pas de quoi vous vous vêtirez » (Mt 6,25 ; Lc 12,22). Ces paroles de l’évangile me reviennent presque automatiquement à la pensée, c’est une habitude que je me suis imposée, lorsque je vois un col romain trop raide. Je ne veux pas m’arrêter à ces détails. Pourtant, récemment, je n’ai pas pu retenir mon esprit de folâtrer sur ce sujet en voyant un appel aux dons, qui émanait de la Fondation Nationale pour le clergé. Cet organisme de l’Église catholique en France sollicitait la générosité des fidèles en faveur des prêtres, religieux et religieuses âgés.


Ce qui a alerté mon attention, c’était l’illustration de cet appel aux dons : une photo très engageante, présentant le Père Henri, 86 ans, large sourire, crâne nettement dégarni, fines lunettes, mais pas de col romain. Sa tenue vestimentaire était révélatrice de sa pastorale : une chemise bleu-clair, au col largement ouvert, sur une veste gris-clair. Seul signe distinctif : une petite croix discrète sur le revers de la veste (www.fondationduclerge.com). Il en va tout autrement des quêtes pour les œuvres de vocations et les séminaires, qui affichent le plus souvent des photos de jeunes clercs, plutôt sérieux, voire austères, avec des cols romains rigides. En terme de marketing, on se demandera lequel de ces deux genres d’illustrations atteint le plus efficacement la générosité des fidèles ? En tout cas, cela illustre nettement deux compréhensions différentes du ministère pastoral, à l’image des styles des papes au tournant du millénaire. Il y eut successivement, entre 1939 et 1963, les papes Pie XII et Jean XXIII, l’un austère et l’autre débonnaire, ensuite, à partir de 2005, Benoît XVI et François.


À présent, comment se situe l’Église catholique en France ? Dans les années 1980 les tendances dans l’épiscopat et dans le nouveau clergé préféraient le col rigide. Or, s’adressant aux séminaristes français réunis à Lourdes début novembre, le préfet de la Congrégation romaine pour le clergé, le cardinal Stella, souhaitait que chacun puisse dire : « Je veux être un prêtre dans le style du pape François, par la proximité, l’affection pour les personnes ». Ce cardinal est proche du pape actuel, dont il donne en exemple « la grande humanité » (La Croix 7 novembre). De fait, cette qualité pastorale primordiale se manifeste dans toutes les initiatives du pape, et tout particulièrement dans la convocation et la conduite du Synode sur la famille. En effet, il vient d’assigner à la deuxième session de ce synode cette mission : « placer l'Église aux côtés des familles en situations extrêmes ».


L’alternance des papes, tantôt austères et tantôt bienveillants, et la présence parmi les prêtres de courants aussi divers, font songer aux évolutions de Jean Baptiste à Jésus : le premier agitait la menace, en évoquant la hache prête à couper l’arbre, tandis que Jésus ménageait la mèche qui fume encore (Mt 3,10 ; 12,20). Or, les tenues ecclésiastiques juxtaposent les deux courants : la raideur d’un col romain et la souplesse soyeuse des ceintures violettes ! Les deux peuvent être portées par la même personne. Mais peut-on laver les cols romains avec des lessives du genre Soupline, pour en atténuer la raideur ? Ce serait merveilleux ! En tout cas, certains porteurs de col romains sont eux-mêmes très souples, du moins pour mettre et enlever leur col. Tantôt on les voit avec, et tantôt, sans. Considèrent-ils leur vêtement comme un uniforme, à revêtir quand ils sont en exercice ? Pourtant la pastorale, c’est comme la médecine. Bien sûr, il y a des temps forts, mais elle affecte la personne en profondeur et de façon permanente, on ne peut pas la déposer au vestiaire.

 

M.M.

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Rédigé par jonasalsace

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